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Cristiana Scoppa et Nathalie Galesne
Script de la vidéo:
En Italie, les personnes en situation de pauvreté absolue ont presque triplé de 2005 à 2021, passant de 1,9 à 5,6 millions, soit presque 10% de la population totale. Dans un tel contexte, on peut aisément imaginer que les femmes les plus pauvres de la péninsule aient des difficultés à se procurer chaque mois les protections hygiéniques dont elles ont besoin.
Généralement, dans les supermarchés, les prix de ces protections vont de 1,50 et 6 euros la confection, en fonction de la qualité, du nombre de pièces, et de la marque. L'offre se limite aux serviettes traditionnelles en cellulose et aux tampons.
Seule la chaîne de supermarché Carrefour propose également des culottes hygiéniques. Dans aucun supermarché, il n’est possible d'acheter des coupes menstruelles ou des serviettes en tissu lavables.
En 2016, quand le député du Parti démocrate Giuseppe Civati a voulu faire baisser la TVA de 22% à 4% sur les protections, sa proposition a été accueillie par des ricanements et des regards embarrassés. Cependant en 2019, grâce à l'engagement de la présidente de la Chambre des députés de l'époque, Laura Boldrini, la taxe sur les serviettes hygiéniques biodégradables a été réduite à 5 %, une manière d’encourager les femmes à acheter des produits plus écologiques.
Les militantes du mouvement féministe Non una di meno se sont battues avec acharnement pour cette diminution, indignées parce que la TVA sur les tampons était largement supérieure à celle sur les produits d'hygiène masculine qui oscillait entre 4% et 10%.
D’autres associations telles que "Tocca a noi" et "Onde rosa » ont lancé des campagnes importantes comme le Tampon Tax Tour" qui a fait étape dans 40 villes italiennes avec des sit-in et des réunions publiques, ou encore l'association "Onde rosa", fondée par une jeune fille de 25 ans, qui a réussi à recueillir plus de 600 000 signatures demandant une réduction de la taxe. La ville de Milan a également accueilli un "Festival des menstruations", trois jours de débats, de performances et de spectacles pour stimuler la mobilisation et aider à briser les des décennies de tabou sur les règles.
En 2022, c'est le tournant : la TVA est abaissée à 10 % sur serviette et tampon, mesure également confirmée en 2023. Il s'agit d'une réduction significative, si l'on considère qu'au cours d'une vie, une femme consomme entre 10 et 14 000 serviettes ou tampons.
Enfin, en 2022, avec le gouvernement de Mario Draghi, c'est le tournant.
La TVA est abaissée à 10 % sur tous les types de tampons et de serviettes, cette mesure sera confirmée dans la loi de finances adoptée pour 2023 par le gouvernement de Giorgia Meloni.
Malgré tout, on est encore loin du 6 % en vigueur au Portugal et en Belgique, du 5,5 % de la France ou de l'abolition complète de la taxe sur les tampons adoptée par le gouvernement irlandais.
Or, rappelons-le, les Italiennes sont particulièrement touchées par la crise. En mars 2022, seules 52,1 % d’entre elles avaient un emploi, et 29,7 % étaient au chômage. Il est donc clair que pour les femmes les plus précaires de la Péninsule, il est de plus en plus problématique de faire face, chaque mois, à la dépense occasionnée par leurs règles.