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Injures et menaces adressées aux personnages féminins des séries ramadanesques
« Salope ! », « sale ! (Dans le sens figuré de l’honneur souillé) », « diabolique ! », « vipère ! », « vieille débile ! », « ânesse ! », « abrutie ! », « sotte ! », « stupide ! », « je te ferai regretter le jour où tu es née ! », « ta gueule sinon je te défigure ! », « je te tue s’il le faut ! »…
Ce déluge d’insultes, d’invectives et de menaces d’agressions physiques, lot des personnages féminins des séries ramadanesque de 2015, a été rapporté par une étude menée par la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle, l’instrument tunisien de régulation des médias, aujourd’hui disparu, en collaboration avec le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel Belge.
L’étude, publiée en 2017, et intitulée Place et image des femmes dans les médias audiovisuels a analysé le corpus de cinq feuilletons diffusés entre le 18 juin et le 17 juillet 2015, à savoir Awled Moufida (Les fils de Moufida) et Hkayet Tounsia (Histoires tunisiennes) (El Hiwar TV), laylet Echchak (La Nuit du doute) ( Attassia TV), Errisque (Le Risque) ( Hannibal TV ) et Naouret Elhwa (Fleur de brise) (TV Nationale ).
Samira Hammami, la coordinatrice de l’étude, qui occupait également le poste de responsable de l’organe de monitoring de la Haica avait révélé dans une conférence de presse organisée le 15 décembre 2017 : « Nous avons dénombré 225 injures sur près de 69 heures de fiction, soit 3,26 injures par heure de fiction ; La moralité et la vertu des femmes sont la première raison de cette violence qui s’insinue dans 54% des propos injurieux ; Les facultés mentales des femmes sont la deuxième cible avec 25% des injures qui sous-estiment la capacité des femmes à raisonner et à réfléchir »
Curieusement sur les cinq feuilletons décortiqués, trois ont été écrits par des…femmes ! Ils comportent eux aussi un lexique injurieux adressé à la gent féminine mais légèrement moins volumineux que dans les scénarios dont les auteurs sont des hommes. L’étude a constaté que dans les équipes de production, une prédominance masculine est constatée dans les postes phares et les métiers de haute technicité avec 100% d’hommes ingénieurs du son et 80% de producteurs et de monteurs.
Par ailleurs, l’étude a démontré une grande stéréotypisation du travail des femmes dans la mesure où 48.85% des séquences font apparaître les personnages féminins sur le lieu de leur travail s’occupant de leurs affaires personnelles et n’exerçant pas d’activités en relation avec leur poste. On y voit aussi des scènes où le métier d’assistant.e et de secrétaire est exclusivement l’apanage des protagonistes féminins.
Lors de la présentation publique de l’étude, Samira Hammami a encore précisé : « L’image des femmes à l’écran est en décalage avec la réalité sociale. Ces représentations biaisées des femmes ont un impact négatif sur toute volonté de changement et de progrès social ».