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Il n’y a ni nourriture ni eau à Gaza. Ce n’est pas une exagération, mais un constat glaçant d’une catastrophe humanitaire qui ravage les corps avant même de figurer dans les rapports des ONG. Une famine dévore chaque foyer, s’attaquant aux corps des enfants, des femmes et des hommes, sans exception. À Gaza aujourd’hui, personne n’est épargné par la faim ou la soif.
Alors que les bombes tombent sans répit sur les civils, l’occupation israélienne ne se limite pas à semer la mort : elle durcit son blocus, et poursuit une politique délibérée d’asphyxie par la faim et la soif. Elle détruit les infrastructures hydrauliques, cible les réservoirs, interdit l’entrée du carburant nécessaire aux stations de dessalement, privant ainsi plus de deux millions de personnes de leur droit à une simple gorgée d’eau potable.
L’épreuve d’accéder à une goutte d’eau
Quant à la nourriture, elle est devenue une chimère. Les étals sont vides, les stocks épuisés, les frontières fermées. Même les efforts des ONG pour distribuer des repas sont paralysés par les frappes et les restrictions. À Gaza, des familles entières marchent durant des heures sous les bombardements, patientent dans des files interminables, sous un soleil implacable, pour quelques bouchées de nourriture de mauvaise qualité, ou un seau d’eau qui ne suffit même pas pour la journée.
Israël mène une stratégie systématique de privation d’eau, ajoutant un crime de guerre de plus à la liste de ceux qui visent la vie quotidienne des civils. À Gaza ville, l’occupant a détruit la conduite principale alimentant le quartier at- Tuffâh, lors du massacre perpétré à l’école Dar Al-Arqam, située dans le même secteur. Depuis, les habitants peinent chaque jour à obtenir de l’eau potable. Partir à la recherche d’une simple gorgée est devenue un parcours d’endurance.
Récipients vides et files de la faim
Hommes, femmes, enfants, personnes âgées... tous attendent pendant des heures, sous une chaleur accablante, dans l’espoir de recevoir une ration de survie, en l’absence de toute alternative. Les points de passage restent fermés, l’aide humanitaire et le gaz de cuisson sont bloqués. Ils viennent avec des casseroles, des seaux, ou n’importe quel récipient pour emporter une maigre portion de nourriture sans goût, mais capable, au moins, d’apaiser temporairement la faim.
Ces soupes populaires sont gérées par des organismes comme le Programme alimentaire mondial (PAM), la Croix-Rouge, et quelques associations caritatives dépendant de l’aide étrangère. Leur objectif : atteindre le plus grand nombre possible de Gazaoui·es, face à l’effondrement économique et à une guerre d’extermination qui dure depuis plus d’un an et demi.
Mais malgré leur rôle vital, ces points de distribution n’échappent pas aux attaques : ils ont été visés à quatre reprises en deux semaines à peine, dans plusieurs secteurs de la bande de Gaza assiégée.
Pourtant, ces lieux sont désignés comme « zones sûres » par l’armée israélienne, des endroits supposément réservés à l’aide humanitaire, où les civils sont régulièrement sommés de se réfugier. Mais c’est précisément là, dans ces lieux d’attente et d’espoir, que des enfants, des femmes et des hommes trouvent la mort sous les bombes.
Imaginez perdre un proche simplement parce qu’il était allé chercher un repas modeste, à peine suffisant pour tenir quelques heures, mais devenu la seule option sous blocus et famine. Voilà la réalité à Gaza.
Lors de l’une de ces frappes contre un point de distribution, trois enfants ont péri. Ils étaient simplement sortis chercher un repas pour leur famille affamée. Ils ne sont pas revenus avec leurs casseroles, mais sur les épaules de leurs proches, leurs petits corps couverts de poussière et de sang.
Leurs ustensiles ont volé en éclats, le riz et les lentilles mélangés à leur sang chaud. Cette scène brutale résume toute l’horreur de la guerre quand elle pénètre le quotidien de ceux qui ont faim.
Ces enfants n’étaient pas des combattants. Ils n’étaient pas armés. Ils portaient uniquement les espoirs de leurs petits frères et sœurs pour un repas chaud. Le bombardement a été la réponse impitoyable à leur faim.
Mourir en attendant de manger
Parmi les victimes, il y avait Mahmoud Al-Karimi et son fils Yahya. Ils étaient sortis ensemble, espérant ramener de quoi nourrir leur famille. Mais les bombes les ont fauchés. Ce n’est pas avec une assiette de lentilles qu’ils sont revenus, mais enveloppés dans des couvertures d’ambulance, sous le regard abasourdi de leurs proches, dans une douleur sans nom.
Imaginez perdre un proche simplement parce qu’il était allé chercher un repas modeste, à peine suffisant pour tenir quelques heures, mais devenu la seule option sous blocus et famine. Voilà la réalité à Gaza.
Le dernier message de Mahmoud sur Facebook était un cri silencieux, qui dit tout :
« Tu trouves ça normal de me voir là, debout dans la file de la soupière, la tête basse, honteux, humilié, juste pour recevoir de la nourriture qu’on ne donnerait même pas à des animaux ? »
Les soupières n’ont jamais été un choix. Elles font partie de ces rares options imposées par la guerre et le siège. La dignité se heurte à la faim dans ces files d’attente, et la peur enveloppe chaque bouchée.
Même les repas distribués sont touchés par le blocus. Les fermetures de frontières et les interdictions d’importation réduisent la qualité des repas. Préparés avec des moyens rudimentaires, des ingrédients manquants, ils calment à peine la faim, sans répondre aux besoins nutritionnels des enfants comme des adultes.
Depuis le début de cette guerre d’extermination contre Gaza, l’armée israélienne a délibérément visé au moins 26 soupières et plus de 37 centres de distribution humanitaire.
