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Par Charity Njeri Ngunyi, Croatia
La voix de Fatima Hassouna devrait encore résonner dans nos oreilles. Cette journaliste qui a préféré la vérité à la sécurité, qui a choisi de raconter les histoires les plus dérangeantes du monde depuis Gaza, a été réduite au silence, avec dix membres de sa famille, par une violence qui semble ne pas avoir de fin.
Fatima a fait ce que tant d’entre nous considèrent comme allant de soi : elle a témoigné. Elle a documenté la vie sous siège avec dignité, clarté et une conviction inébranlable que le monde doit savoir, doit se préoccuper, doit agir. Sa mort n’est pas une note de bas de page. C’est un avertissement et une exigence.
Nous devons à Fatima de ne pas détourner le regard.
Nous lui devons d’amplifier les vérités qu’elle est morte en essayant de dire.
Nous lui devons de demander des comptes à ceux qui détiennent le pouvoir, de refuser le confort du silence.
Nous nous souvenons de son nom. Nous partageons son histoire. Nous défendons la liberté des journalistes partout dans le monde, en particulier ceux dont le seul « crime » est de refuser que la souffrance humaine soit ensevelie sous les décombres de l’indifférence.
Il est difficile de trouver des mots assez tranchants, ou un chagrin assez lourd, pour décrire ce qui arrive aux journalistes de Gaza.
Ce dont nous sommes témoins n’est pas un dommage collatéral. Il s’agit d’un effacement systématique des témoins, d’une campagne délibérée visant à réduire au silence ceux et celles qui osent dire la vérité. Fatima Hassouna, comme tant d’autres, ne tenait pas d’arme. Elle tenait une caméra, un microphone, un carnet de notes—et c’est pour cela qu’elle a été prise pour cible.
Nous devons à Fatima de ne pas détourner le regard.
Nous lui devons d’amplifier les vérités qu’elle est morte en essayant de dire.
L’assassinat de journalistes par l’armée israélienne ne peut être justifié par l’excuse usée du « brouillard de guerre ». Le schéma est trop clair, les chiffres trop brutaux. Il ne s’agit pas de chaos, mais d’une politique. Il s’agit d’une guerre non seulement contre un peuple, mais aussi contre la mémoire, contre l’histoire, contre la possibilité même que le monde puisse voir et refuser d’oublier.
Chaque journaliste assassiné.e est un message : « Vous ne parlerez pas. Vous ne montrerez rien. Vous n’aurez pas d’importance. »
Mais chaque mort doit renvoyer un message plus fort : « Nous vous voyons. Nous ne nous tairons pas. Nous nous souviendrons. »
Je ressens de la rage. Je ressens de la tristesse. Je ressens une honte profonde et croissante pour tous les gouvernements, toutes les institutions médiatiques, toutes les voix confortables qui refusent encore d’appeler cela par son nom : un crime contre l’humanité.
Les journalistes ne sont pas des combattants. Ils sont les gardiens de la vérité. Les tuer est un acte de terreur.
Nous devons nous lever maintenant, et non pas lorsque la dernière caméra s’éteindra.