« Nous, responsables d’associations féministes, affirmons le droit des femmes au respect de leur corps sexué et co-signons ce manifeste en dix principes... ». Ce manifeste signé par Le Front Féministe, est né le 8 mars 2022, à l’initiative de féministes françaises dont Florence Montreynaud (1). Outrée par les propos sexistes, insultée et agressée lors d’un précédent 8 mars, elle a décidé de réagir en fédérant les associations, en France, en Europe, et jusqu’au Canada. Plusieurs associations féministes méditerranéennes ont également commencé à répondre à l’appel.
Au départ, elles étaient deux : Les Chiennes de garde et Zéromacho, cette dernière association ayant le mérite de réunir des femmes et des hommes féministes. Un mois jour pour jour après le lancement du manifeste, elles sont plus de 50 à l’avoir signé : des plus petites aux plus grandes et plus connues, comme la Fédération Nationale Solidarité Femmes qui rassemble 70 centres d’hébergement, Femmes Solidaires qui a une longue histoire de lutte féministe, Femmes pour le dire Femmes pour agir, association de femmes handicapées citoyennes, ou encore l’Amicale du Nid qui fait un énorme travail de prévention et de soutien des femmes prostituées.
« Il y a autant de dangers qui guettent les femmes que de paragraphes du manifeste » souligne-t-elle malicieusement. En dix points, ces dangers sont déroulés, à commencer par l’exploitation sexuelle de femmes et de petites filles qui, loin de régresser, se banalise. « Ils sont dans l’ordre logique des priorités reconnues par les féministes signataires ».
Dès le premier point, nous voilà fixées : « La prostitution est une exploitation sexuelle machiste ».
Le ton est donné, clair et sans fioritures. Tous les sujets abordés ne vont pas de soi, mais « On n’allait pas aborder l’avortement ou les mariages forcés qui sont consensuels entre nous » commente Florence Montreynaud. En revanche, il parait essentiel de « S’affirmer clairement contre la marchandisation des femmes par la prostitution, la pornographie et la location d’utérus ; contre la culture du viol, inhérente au système patriarcal ; contre le contrôle du corps et de l’apparence des femmes ; contre l’effacement du sexe au profit du genre ».
Comme beaucoup de féministes universalistes, Florence constate l’effacement progressif du mot « Femmes » dans l’espace médiatique. Effacement recherché par les masculinistes, avec volonté de nier la différence des sexes en utilisant la trans-sexualité comme cheval de Troie. « Certes, personne n’a l’exclusive de l’étiquette "Féministe", ajoute Florence, mais pour celle qui a commencé de militer dès les années 70, il faut à la fois revenir aux fondamentaux et avancer ensemble sur la même ligne de front face aux sujets contemporains. Le patriarcat existe toujours et la situation se détériore dans de nombreux pays. Entre les attaques de l’extrême droite, des religieux et celles des extrémistes qui se veulent ultra-progressistes, les temps sont dangereux pour les femmes... en même temps, le mouvement MeToo est passé par là.»
En se positionnant sur la base la plus large et la plus consensuelle possible, le manifeste se propage comme une trainée de poudre pacifiste et saute allègrement les frontières. Les soutiens arrivent désormais de toute l’Europe : la Belgique, le Canada, mais aussi l’Italie, l’Espagne, la Grèce... La soixantaine de signatures d’associations va être atteinte prochainement : « Certaines sont dans l’attente de réunir leur Conseil d’administration pour faire partie du Front Féministe. Beaucoup d’autres signatures vont arriver. Le féminisme est un mouvement révolutionnaire et internationaliste, il n’y a pas de frontières pour les féministes.»