Plus éduquées, mieux formées, les Algériennes sont malgré tout de grandes perdantes sur le marché du travail.

En Algérie, le nombre de femmes actives continue de progresser. Cette évolution de l’occupation féminines est sensiblement liée aux changements démographiques et socioculturels constatés depuis les années 1990 ainsi qu’à l’élévation de leur niveau d’instruction. Cependant, les statistiques font apparaitre de fortes disparités entre les hommes et les femmes sur le marché du travail avec des écarts qui figurent parmi les plus importants au monde.

En Algérie, le nombre de femmes actives a continuellement progressé passant de 4 % en 1996 à 19,5% en 2016 (Benhabib et Adair, 2017). Cette évolution du comportement d’activité des femmes est sensiblement liée aux changements démographiques et socioculturels constatés depuis les années 1990, à savoir : le recul de l’âge moyen du mariage qui est passé de 18 à 29 ans, la progression de l’éducation, l’évolution de la pratique contraceptive et la baisse de mortalité infantile et juvénile (Benhabib et Adair, 2017). Cette progression est également constatée pour les taux de scolarisation avec une évolution de 57 % entre 1966 et 2013. En 2012, l’effectif féminin représente 60% du total des inscrits de l’enseignement supérieur. Cependant, les statistiques font apparaitre de fortes disparités entre les hommes et les femmes sur le marché du travail avec des écarts qui figurent parmi les plus importants au monde. En dépit de l’évolution des comportements d’activités des femmes et de l’élévation de leur niveau d’instruction, elles demeurent minoritaires sur le marché du travail. Selon l’ONS (Office National des Statistiques), le taux de chômage en Algérie était de 11,4 % en 2019. Ce taux représente 9,1 % chez les hommes contre 20,4 % chez les femmes. La population active est de 42,2 % pour la même année. Ce taux est estimé à 66,8% chez les hommes contre seulement 17,3 % chez les femmes.

Les graphiques sont extraits de la thèse Chômage des jeunes et inégalités d’insertion sur le marché du travail algérien: analyses multidimensionnelles et expérimentation de Lamia Benhabib, soutenue en 2017.

Il est difficile de dresser un tableau exhaustif des causes d’une telle disparité et d’expliquer avec précision pourquoi les femmes sont majoritaires sur les bancs des universités et en bout de file dans la course à l’emploi tant les études sur le sujet avec une approche sexospécifique sont peu nombreuses et les statistiques quasi absentes ou alors trop superficielles. Cependant, certains obstacles structurels et culturels peuvent partiellement expliquer ce déséquilibre : le poids des traditions et les contraintes familiales qui participent à limiter les possibilités des femmes en matière de choix du poste d’emploi et de mobilité, les conceptions archaïques et passéistes promus par certains segments de la classe politique et la sphère culturelle, les préjugés et stéréotypes de genre. Une perte considérable pour le capital « compétences » du pays mais également pour la situation matérielle des femmes, leur qualité de vie et leur statut social.

La question de l’emploi est un défi majeur pour tous les pays, cependant avec des degrés variables. Les pays en développement, dont l’Algérie, sont plus touchés par le chômage en général et encore plus par celui des femmes.  Si les disparités dans les acquis en matière d’égalité hommes-femmes creusent un écart important entre les pays du « Nord » et les pays du « Sud », il est assez facile d’imaginer les contrastes disproportionnés qui existent entre les grandes villes et les zones rurales. Dans les communautés des zones rurales en Algérie, on observe un niveau de pauvreté élevé et un niveau d’instruction plus faible que la moyenne nationale. La vulnérabilité financière des femmes qui en résulte est d’autant plus importante.

Les graphiques sont extraits de la thèse Chômage des jeunes et inégalités d’insertion sur le marché du travail algérien: analyses multidimensionnelles et expérimentation de Lamia Benhabib, soutenue en 2017.

Quelles sont donc les solutions envisageables pour pallier ce déficit ?  Les inégalités hommes-femmes présentent tellement de facettes qu’il n’existe pas de remède unique. Parmi les solutions clés, il y a la suppression des obstacles sociaux et l’aide aux femmes défavorisées pour leur permettre d’acquérir des compétences. C’est dans cette perspective que plusieurs projets ont vu le jour en Algérie, dont celui de Badra Hafiane, véritable héroïne du quotidien, à laquelle nous consacrons un article dans ce dossier sur « Femmes et argent ».

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